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Erreurs dans les rapports de solvabilité – Le rôle du SAI
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Par Chelene Riendeau, PAIR, SAI, vice-présidente, Insolvabilité des consommateurs, MNP Ltd.
Vous avez transmis un certificat de libération ou un certificat d’exécution intégrale à un débiteur. Le voilà donc libéré de ses dettes, prêt à prendre un nouveau départ. Le débiteur bénéficiera-t-il vraiment du nouveau départ auquel il a droit, ou trouvera-t-il des erreurs et des inexactitudes dans son rapport de solvabilité qui le pousseront à composer avec une multitude de problèmes pour les corriger? Les problèmes que rencontrent les débiteurs quant à leur rapport de solvabilité n’ont rien de nouveau, car ils existent depuis des années. Malheureusement, le système et les personnes responsables de la communication et de la modification des renseignements ne semblent pas améliorer leurs façons de faire pour éviter les erreurs récurrentes. Avez-vous, en tant que SAI, préparé le débiteur aux difficultés qu’il pourrait rencontrer quant à son rapport de solvabilité, autant avant qu’après la période d’insolvabilité?
Avoir un bon dossier de crédit est important. L’incidence que peut avoir une faillite ou une proposition sur la cote de crédit est sans doute l’une des principales raisons pour lesquelles un débiteur peut être réticent à déposer une procédure d’insolvabilité officielle. On peut imaginer la déception et la frustration d’un débiteur qui, après avoir pris la décision difficile de déclarer faillite ou de déposer une proposition, découvre que, pendant ou après le processus, les renseignements figurant dans son rapport de solvabilité sont inexacts, ce qui a une incidence négative sur sa cote de crédit.
Les deux principales agences d’évaluation du crédit au Canada – Equifax et TransUnion – recueillent, consignent et transmettent des renseignements sur la façon dont les gens gèrent leur crédit. La plupart des provinces possèdent des lois sur l’évaluation du crédit. Ces dernières décrivent les pratiques que doivent adopter les différentes agences ainsi que les personnes utilisant les renseignements de crédit afin de protéger les droits des consommateurs.
Les agences de renseignements sur les consommateurs ont un devoir de diligence envers les consommateurs à l’égard de tout rapport qu’elle publie à leur sujet. La norme de diligence applicable exige que les agences d’évaluation du crédit exercent leurs fonctions avec honnêteté, exactitude, compétence et diligence, le tout en conformité avec leurs obligations légales. Haskett v Equifax Canada Inc. (2003), 63 OR (3d) 577 (CA); Bakich v Equifax Canada Inc. [2008] OJ No 5562 (SCJ Sm Cl Ct).
Dans un contexte d’insolvabilité, les archives publiques sont présentées par le Bureau du surintendant des faillites au sujet des dossiers déposés et de la libération du débiteur. Les créanciers sont tenus de déclarer l’état du compte et de préciser que la dette est incluse dans la faillite ou la proposition. Les créanciers ne devraient pas continuer à signaler les défaillances et les arriérés de paiement pendant la faillite ou la proposition. Cependant, il arrive trop souvent que l’information ne soit pas mise à jour et donc déclarée incorrectement. Malgré la norme de diligence que les agences d’évaluation du crédit se doivent de respecter, il semble y avoir un certain manque d’imputabilité de la part des créanciers et des tiers qui présentent des rapports erronés.
Problèmes courants auxquels les débiteurs font face en raison d’erreurs dans leur rapport de solvabilité
La liste suivante n’est pas exhaustive et ne fait qu’énumérer les erreurs les plus courantes relevées par des collègues :
- Les retards importants dans la communication des nouveaux renseignements aux agences d’évaluation du crédit après la libération.
- Les créanciers qui signalent activement les défaillances et les arriérés de paiement pendant le processus de dépôt de la demande d’insolvabilité.
- Les créanciers qui n’indiquent pas dans les notes que le compte est « inclus dans la faillite » ou « radié ».
- Les paiements en retard qui sont enregistrés après le dépôt de la demande d’insolvabilité.
- Les dates inexactes (p. ex., la date du certificat d’exécution intégrale est souvent inexacte lorsque la proposition est payée plus tôt).
- La duplication d’archives publiques.
- Les propositions de consommateur cotées R9 (faillite) plutôt que R7 (proposition/règlement).
- Les propositions de consommateur indiquant « proposition de faillite » ou « proposition concordataire », ce qui est trompeur à la lecture du rapport.
- La proposition ou la faillite a une incidence négative sur le rapport du codébiteur, même si le codébiteur n’a pas déposé de demande.
- Certaines créances gouvernementales sont déclarées en défaut de paiement pendant le dépôt de la demande d’insolvabilité, même si elles continuent d’être payables, et continuent d’être signalées ainsi jusqu’à ce qu’une copie de la libération du syndic soit fournie. Cela entraîne une dégradation importante de la cote de crédit du débiteur, en particulier dans le cas d’une proposition de consommateur de cinq ans.
- La déclaration d’une dette garantie (un prêt automobile) comme étant incluse dans la faillite lorsque le débiteur conserve le véhicule et continue d’effectuer ses versements.
Ces erreurs peuvent avoir une grande incidence sur la cote de crédit du débiteur. Ce dernier peut donc subir un traitement injuste de la part des créanciers ou d’autres parties. Les rapports de solvabilité sont utilisés pour obtenir du crédit, mais aussi pour les demandes d’emploi, les demandes de logement et de location, les demandes de services publics et téléphoniques, et les demandes d’assurance (vie, automobile et autre). Ces erreurs peuvent empêcher le débiteur de louer un appartement ou de se qualifier pour un prêt hypothécaire ou un prêt. Les services publics peuvent lui être refusés, et il peut même être amené à payer un taux d’intérêt élevé sur un prêt en raison de sa cote de crédit dépréciée.
Défis rencontrés par les syndics
En tant que SAI, nous sommes souvent la première personne vers laquelle le débiteur se tourne pour obtenir de l’aide afin de corriger les erreurs figurant sur le rapport de solvabilité. Pour des raisons de confidentialité, nous ne pouvons pas communiquer directement avec les agences d’évaluation du crédit au sujet des créanciers du débiteur ou de l’état de son dossier d’insolvabilité. Par conséquent, l’aide que nous pouvons apporter est limitée.
Equifax et TransUnion offrent tous deux des processus de règlement des différends gratuits, mais ces processus peuvent prendre beaucoup de temps, ce qui fait en sorte que le débiteur se décourage ou abandonne tout simplement.
Voici les difficultés courantes que rencontrent les syndics :
- Les débiteurs inexpérimentés ne disposant pas des ressources ou des capacités nécessaires pour mener à bien le processus de résolution des différends.
- Les barrières linguistiques avec les nouveaux Canadiens pouvant avoir de la difficulté à comprendre leur rapport de solvabilité ou le processus de résolution.
- Les créanciers qui ne respectent pas les règles.
- Les provinces ayant des règles différentes sur l’évaluation du crédit.
- Le manque de renseignements disponibles sur les rapports de solvabilité.
- Les agences d’évaluation du crédit qui recommandent au débiteur d’appeler les créanciers, lesquels orientent ensuite le débiteur vers le syndic.
- Les débiteurs qui ne comprennent pas ou ne suivent pas les recommandations fournies par le syndic concernant les options qui s’offrent à eux pour assurer l’exactitude de leur rapport de solvabilité.
Ces problèmes sont courants et se produisent si fréquemment que nous et nos équipes consacrons beaucoup de temps à aider les débiteurs, et ce, souvent longtemps après que leur dossier a été fermé et que nous ne sommes plus responsables de ces derniers.
Quelles sont les pratiques exemplaires que les syndics devraient adopter?
Renseignez-vous. Sachez comment lire les rapports de solvabilité d’Equifax et de TransUnion afin de pouvoir cerner les erreurs et donner des conseils au débiteur. Vérifiez l’exactitude des renseignements que vous donnez et informez le débiteur des erreurs courantes qu’il pourrait rencontrer. Préparez le débiteur au fait que le processus de règlement des différends peut prendre du temps et que les corrections ne se feront pas du jour au lendemain.
Autres conseils et pratiques exemplaires :
- Discutez du rapport de solvabilité et des erreurs dont il pourrait faire l’objet à plusieurs reprises au cours du processus d’insolvabilité (au moment du dépôt de la demande ou de la proposition de consommateur, à la deuxième séance de consultation et à la libération).
- Procurez un modèle de lettre et de courriel au débiteur comprenant les coordonnées des agences d’évaluation du crédit ainsi que des instructions détaillées sur la façon et le moment de vérifier son rapport de solvabilité.
- Conseillez au débiteur de vérifier régulièrement son rapport de solvabilité. Il pourra donc prendre les mesures appropriées pour que les erreurs soient corrigées en temps utile. N’oubliez pas de lui dire que le simple fait de vérifier son rapport de solvabilité n’aura aucune incidence sur sa cote de crédit.
- Expliquez la différence entre les deux agences d’évaluation du crédit et les applications de technologie financière, comme Credit Karma et Borrowell.
- Informez le débiteur que déposer une demande de règlement d’un différend est gratuit et qu’il peut le faire aussi souvent qu’il le souhaite.
- Demandez au débiteur de communiquer avec le créancier ou le prêteur afin que son compte soit mis à jour.
- Si un créancier refuse de reconnaître ou de respecter la suspension des procédures ou déclare des renseignements inexacts, fournissez au débiteur les coordonnées du Bureau du Surintendant des faillites pour qu’il puisse déposer une plainte.
- Si le débiteur est en mesure de payer les services d’un professionnel, recommandez-lui de faire appel à un expert du crédit se spécialisant dans la correction des rapports de solvabilité ou d’obtenir des conseils juridiques concernant la possibilité d’intenter une action en justice contre les agences d’évaluation du crédit pour les dommages encourus.
En conclusion, les erreurs figurant dans les rapports de solvabilité ont une incidence importante sur les débiteurs. Il y a un manque d’imputabilité de la part des parties responsables de l’exactitude des renseignements déclarés. Bien que nous devons faire preuve de neutralité dans le processus d’insolvabilité, il peut être difficile de ne pas plaider en faveur du débiteur dans ces circonstances.
Remerciements : J’ai eu le plaisir de m’entretenir avec Guylaine Houle, BCL, FCIRP, de Pierre Roy & Associés inc. à Montréal, QC; Jennifer McCracken, partenaire chez BDO à Vancouver, C-B; Jillian Anderson, administratrice d’actifs principale chez MNP à Red Deer/Stettler, AB et Richard Moxley, de Credit Expert à Calgary, AB. Ils m’ont fait part de leurs connaissances, de leur point de vue et de leur expérience sur le sujet. Merci pour votre temps et votre contribution à cet article.