Les différentes stratégies de gestion de la dette pour les petites entreprises

15 mai 2025

La plupart des Canadiens qui créent une petite entreprise ont rarement des liquidités à investir (ou de l’argent à brûler, le cas échéant). Par conséquent, les petites entreprises ont souvent besoin de s’endetter pour démarrer, rester à flots ou étendre leurs activités. Selon un rapport du Gouvernement du Canada[1] qui contient une analyse des tendances concernant les petites entreprises canadiennes (à savoir, les entreprises comptant 1 à 99 employés) de 2009 à 2022, les petites entreprises recourent au financement par emprunt pour deux grandes raisons, à savoir assumer les dépenses quotidiennes effectuées à même leurs fonds de roulement et d’exploitation ou acheter et entretenir des immobilisations corporelles. Elles le font aussi dans le but d’acheter ou de développer une entreprise, de prendre pied sur un nouveau marché, de financer la recherche et le développement, ou de consolider leur dette. Toutes ces raisons, sauf peut-être dans une moindre mesure la dernière, peuvent avoir des connotations positives quant aux perspectives d’avenir de l’entreprise concernée.

La gestion de la dette est une sous-catégorie essentielle de la gestion des capitaux, et une gestion efficace des capitaux peut contribuer à transformer une bonne idée en une entreprise florissante. Souvent, c’est une seule personne, une famille ou un petit groupe de personnes qui possède et exploite la petite entreprise, dont la direction est elle aussi assurée par une seule personne ou un petit groupe de personnes qui doivent en gérer tous les aspects. Or, très rares sont les gens qui sont doués pour chaque aspect de la gestion d’une entreprise. Une mauvaise gestion de la dette peut créer ou aggraver des pressions et des tensions qui affectent non seulement le rendement quantitatif de l’entreprise mais aussi la capacité à gérer efficacement les aspects qualitatifs de son activité. Dans cet article, nous recensons cinq principes et stratégies de gestion de la dette pour les petites entreprises.

1. C.R.E.A.M.[2] (le cashflow règne en maître autour de moi)

Les prévisions de trésorerie sont un outil essentiel pour toute petite entreprise. Même les prévisions les plus rudimentaires peuvent aider une entreprise à planifier la meilleure manière d’utiliser les liquidités dont elle disposera, en sachant notamment quand elle aura les liquidités requises pour rembourser sa dette et quand elle devra s’endetter pour couvrir le manque de liquidités. Demandez-vous si votre équipe dirigeante a les compétences requises pour préparer des prévisions de trésorerie appropriées ou s’il serait utile de recruter un conseiller externe qui vous aidera à préparer un modèle prévisionnel entièrement intégré pour vos flux de trésorerie et vos états financiers.

Une fois qu’elle dispose d’un modèle prévisionnel, la direction doit examiner les écarts entre les projections et les résultats réels, sous peine de réduire son modèle à un simple exercice de style. Elle doit vérifier les hypothèses et mettre régulièrement à jour les projections en privilégiant le réalisme plutôt que l’optimisme. Pour dire les choses simplement, une entreprise ne doit pas dépenser plus que ce qu’elle peut gagner. Mieux votre entreprise peut prévoir sa trésorerie, mieux elle peut gérer sa dette.

2. Tout est une question de priorités

Une fois qu’elle dispose de prévisions de trésorerie, la direction doit dresser une liste des dettes impayées de l’entreprise et des informations pertinentes, comme les taux d’intérêt, les dates d’échéance, les exigences minimales de paiement, et les dates d’exigibilité. Une fois toutes ces informations organisées, il faut classer ces dettes selon leur taux d’intérêt et leurs dates d’échéance. Apposez un repère sur les comptes des fournisseurs indispensables, ceux pour lesquels un défaut ou un retard de paiement pourrait nuire à la capacité de fonctionnement de l’entreprise. Après avoir comptabilisé les paiements minimaux mensuels, utilisez les liquidités disponibles pour rembourser les dettes grevées des taux d’intérêt les plus élevés. Les effets ne se feront peut-être pas sentir immédiatement, mais cette pratique permettra d’optimiser les coûts totaux d’emprunt à long terme.

3. Une stratégie est vouée à évoluer

Lorsqu’une petite entreprise élabore sa stratégie de gestion de la dette, elle doit tenir compte des besoins recensés dans le modèle prévisionnel, de son plan d’affaires et de ses antécédents financiers récents. Les petites entreprises ne doivent pas hésiter à changer de tactique si elles n’obtiennent pas les résultats visés et qu’elles n’attendent rien de l’atteinte de ces résultats.

La direction doit agir avec diligence et chercher des solutions pour refinancer les dettes existantes. Elle peut peut-être faire baisser le taux d’intérêt moyen ou global, amortir la dette sur une plus longue période afin d’améliorer sa trésorerie, ou même regrouper toutes ses dettes de manière à avoir un échéancier et un taux d’intérêt fixes, ce qui simplifiera son calendrier de remboursement et lui permettra de mieux prévoir les sorties de fonds régulières.

De plus, les petites entreprises ne doivent pas craindre de renégocier leurs conditions de remboursement avec leurs créanciers individuels. Elles nouent souvent des relations personnelles avec leurs partenaires commerciaux, notamment leurs fournisseurs, banquiers, ou prêteurs. Si elles communiquent régulièrement avec eux, et agissent avec transparence et bonne foi, leurs créanciers peuvent être mieux disposés à écouter leurs propositions pour traiter les dettes existantes.

4. B.C.M.B.C. (Avant tout Bien Conclure[3], Mais Baisser les Coûts)

Nous empruntons en la modifiant légèrement, cette maxime bien connue pour énoncer cette stratégie arithmétique évidente mais importante de la gestion de la dette, à savoir gagner plus, et dépenser moins. Cela dit, dans cet article, nous allons plutôt nous concentrer sur la deuxième partie.

Réduire les coûts peut améliorer les marges et libérer des liquidités pour rembourser les dettes. Les petites entreprises doivent surveiller étroitement leurs coûts et envisager de faire ce qui suit : a) réduire les dépenses non essentielles; b) réorganiser et optimiser les frais généraux fixes; c) renégocier les contrats avec les fournisseurs; et d) refinancer les dettes existantes en contractant un emprunt moins coûteux. Cependant, elles doivent aussi tenir compte des effets de la réduction des dépenses sur l’efficience, la productivité et la qualité ainsi que sur le moral du personnel.

5. Il faut parfois faire des choix difficiles

Les propriétaires de petites entreprises doivent souvent prendre des décisions difficiles concernant leurs activités, surtout en ce qui concerne leur stratégie de gestion de la dette. Les propriétaires et les dirigeants d’une petite entreprise sont souvent sentimentalement attachés à celle-ci ou à certains de ses aspects, ce qui peut les conduire à avoir des réactions fondées sur l’émotion plutôt que sur la raison. La décision la plus logique et la plus pratique est rarement la plus attrayante. Parmi ces solutions peu attrayantes, citons notamment : a) vendre des actifs obsolètes ou sous-utilisés; b) renoncer à des lignes de produits ou à des contrats commerciaux qui offrent une faible marge ou qui ont un rendement insuffisant; c) réduire l’effectif ou la présence commerciale de leur entreprise afin de tenir compte de la situation actuelle; d) reconstituer le capital de l’entreprise au moyen d’avances ou d’investissements personnels; e) diluer la propriété de l’entreprise grâce à l’investissement d’un tiers; f) restructurer l’entreprise grâce à des procédures formelles de réorganisation ou d’insolvabilité; ou g) sortir de l’entreprise par la vente, la liquidation ou la faillite.

La gestion de la dette pose de grandes difficultés pour de nombreuses petites entreprises au Canada. Il est essentiel que les propriétaires et les dirigeants de ces entreprises puissent accéder à des renseignements et à des analyses de bonne qualité afin d’être en mesure de mettre en œuvre des changements positifs pour leur entreprise. Sans les données et les analyses appropriées, aucune stratégie de gestion de la dette ne peut être élaborée. En demandant l’aide d’un professionnel pour élaborer cette stratégie vous pourrez faire de votre bonne idée une entreprise florissante.

 

[1] Innovation, Sciences et Développement économique Canada, Direction générale de la petite entreprise, Direction de la recherche et de l’analyse, Tendances des conditions du crédit des petites entreprises entre 2009 et 2022, août 2023 (consulté le 15 avril 2025). Sur Internet : <URL:https://ised-isde.canada.ca/site/recherche-statistique-pme/fr/donnees-analyses-denquetes/enquete-conditions-credit/tendances-conditions-credit-petites-entreprises-entre-2009-2022>.

[2] Clifford Smith Jr (alias Method Man), rappeur, « C.R.E.A.M. », dans Enter the Wu-Tang (36 Chambers), par le Wu‑Tang Clan, Loud Records et RCA Records, 1993. Veuillez accepter nos sincères excuses pour l’utilisation libérale et le léger détournement de l’acronyme. [Ndt: cashflow signifie trésorerie].

[3] Glengarry (film), réalisé par James Foley, New Line Cinema, 1992, adaptation de la pièce de théâtre Glengarry Glen Ross de David Mamet (visionné le 29 août 2015). Sur Internet : <URL:https://www.youtube.com/watch?v=bm63uompzV0>.

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